LES TRANCHES DE
VAISSEAUX
En modélisme d'arsenal, la réalisation de
tranches de vaisseaux est une discipline peu
pratiquée et donc peu connue. Pourtant, cette forme
de création est riche d'informations pour
l'observateur curieux de détails souvent difficiles
à examiner sur les modèles de coques
complètes.
Comme pour ces dernières, il est nécessaire de
faire des choix pour la mise en œuvre d'une tranche ou
section. On peut traiter la moitié de la tranche en
démonstration de charpente, l'autre moitié
étant entièrement équipée et
accastillée. Pour ma part, je préfère
une réalisation complète plus conforme
à "l'esprit" de la tranche qui doit montrer le
vaisseau de façon réaliste, (bien que le
modélisme d'arsenal soit souvent sujet à
conventions...). Seule la membrure se retrouvera en partie
dissimulée. La charpente intérieure du
vaisseau est parfaitement visible et ne réclame pas
d'aménagements particuliers pour sa
présentation. La construction d'une tranche
nécessite moins de travail que celle d'un vaisseau
entier mais la réalisation doit en être
beaucoup plus rigoureuse car le moindre assemblage
étant parfaitement visible, il doit être
irréprochable. D'autre part, la réalisation
d'un nombre réduit de pièces évite la
lassitude engendrée par la multiplication des
éléments de charpente ou d'accastillage. Ceux
qui ont déjà planté les centaines de
clous des mantelets de sabords ou de chevilles en bois dans
la carène me comprendront.
Il y a un autre aspect intéressant à ce genre
de création. Le modéliste qui a
déjà construit des modèles simples et
qui a envie de construire un modèle d'arsenal est
souvent rebuté par la complexité, le volume et
l'incertitude de ne pas aboutir. La complexité est
indéniable. Toutes les pièces de charpente qui
composent la structure du vaisseau ont des assemblages et un
montage qui ne sont jamais simples. Une section de vaisseau
comporte tout au plus une quinzaine de couples, sept ou huit
baux par pont et une artillerie réduite à une
douzaine de pièces en équipant les deux bords.
Pour s'essayer au modélisme d'arsenal, il y aura
déjà suffisamment de travail pour se forger
une opinion. La réalisation des couples est simple
car ils n'ont pas ou peu d'équerrage et les parties
de charpente les plus difficiles à réaliser,
l'avant et l'arrière, sont passées sous
silence. La section du Fleuron au 1/36ème a un volume
d'une trentaine de centimètres de coté. Ce
modèle est très logeable et surtout facilement
transportable. De plus, les dimensions réduites de la
tranche permettent de travailler à une échelle
aisée, le 1/36ème est bien agréable
à adopter car la section des pièces est alors
conséquente.
Sans être une fin en soi, ce type de modélisme
est une bonne approche pour le débutant et devient un
exercice de style de haut niveau pour le modéliste
confirmé. Bien-sûr il y a le regret de ne pas
construire la totalité du vaisseau mais l'aspect
pédagogique est privilégié, surtout
dans les principes de construction de la charpente. Le choix
de la partie du vaisseau à traiter est à la
libre décision du modéliste mais souvent, la
partie incluant le grand mât, donc comprise entre la
grande écoutille et l'écoutille aux vivres est
préférée pour les vaisseaux du
XVIIIème siècle. On peut aussi
réaliser, avec de l'expérience, un
arrière complet permettant de détailler les
logements ou toute autre partie du navire. Toutes sont
intéressantes mais la partie centrale du vaisseau est
la plus représentative des techniques
générales de construction tout en restant
très attrayante. Pour ma part, j'ai choisi de
construire une section aux abords du maître-couple
dans les limites des écoutilles
précédemment citées. Cela inclut
beaucoup d'éléments de charpente
présents par ailleurs dans le vaisseau.
L'examen d'une tranche de
vaisseau associée à celui d'un modèle
permet d'en apprécier les dispositions
intérieures et d'appréhender ainsi les volumes
et l'esprit. La possibilité de pouvoir observer la
subtilité de la construction est
privilégiée et l'aspect didactique de la
tranche est ainsi mis en évidence.
En conclusion, j'espère que ces quelques pages
convaincront quelques modélistes à faire le
pas vers un travail plus personnel. Il existe dans ma
région -toulousaine- (et sûrement ailleurs)
plusieurs d'entre eux qui ont un réel talent mais qui
estiment le modélisme d'arsenal trop
compliqué. L'évolution de leur adresse et la
progression leurs connaissances se trouvent donc
contrariées. La réalisation d'une section de
navire pourra peut-être leur démontrer que si
la complexité existe, elle est facilement
maîtrisable. Et quel plaisir ensuite de disposer d'un
modèle dont la fiabilité historique et
technique est irréprochable. Et ceci les
amènera ensuite vers la suite logique qui est,
bien-sûr, la construction d'un modèle
entier...
|